Bon à savoir : Malfaçons

Personne n'est à l'abri d'éventuelles malfaçons. Mais en cas de problème, trois garanties vous protègent. Une sécurité indispensable, dès lors qu'il s'agit d'un gros chantier. N'oubliez pas pour autant de vous assurer vous-même. Lorsque les travaux sont enfin terminés, il est indispensable de procéder, avec l'entreprise, à leur réception formelle. C'est l'acte par lequel vous allez, en qualité de maître d'ouvrage, déclarer accepter, avec ou sans réserves, les travaux effectués. C'est aussi cette démarche qui vous permettra de faire jouer les garanties contre les défauts d'exécution. Elle est donc primordiale.

FAIRE JOUER LES GARANTIES

En général, l'entrepreneur fixe le rendez-vous de la visite. Il sait que l'acceptation des travaux se tra- duit par le versement du solde. Bien sûr, certains entrepreneurs ne se pressent pas. Conscients de la mauvaise exécution du travail, contents d'avoir perçu une grande partie du règlement, ils préfèrent la politique de l'autruche à une obligation de refaire... Dans ce cas, envoyez à l'entrepreneur une convocation avec accusé de réception, fixant une date et une heure précise. Vous pouvez accepter les travaux sans autre forme de procès-verbal, mais cela implique un risque, celui de ne pas pouvoir les contester ensuite.

En cas d'absence de l'entrepreneur. Malgré votre convocation, l'entrepreneur n'est pas là, et il n'a envoyé personne pour le représenter. Tant pis!

La procédure peut avoir lieu sans lui, elle sera valable. Il vous suffira ensuite de lui envoyer le procès-verbal par lettre recommandée avec accusé de réception, pour qu'il prenne connais- sance de vos réserves... et les répare. Pour des raisons de preuves, il est nécessaire que la réception des travaux soit formalisée par écrit et signée par vous.

Si vous n'avez traité qu'avec un seul entrepreneur, vous n'aurez à effectuer qu'un seul procès-verbal de réception. Si vous avez coordonné les interven- tions de plusieurs corps de métier, plusieurs procès-verbaux devront être établis. C'est toujours mieux de convoquer l'ensemble des professionnels le même jour. Le cas échéant, associez l'architecte à cette procédure, il vous donnera conseils et appréciations sur le plan technique.

Le procès-verbal

Lors de la réception des travaux, et à l'issue de la visite du chantier, plusieurs cas de figure peuvent se présenter: ou l'ouvrage vous paraît bien exécuté, ou, au contraire, vous relevez des malfaçons. Dans ce cas, vous pouvez émettre des réserves, ou encore refuser la réception.

Tout va bien

Si les travaux ont été réalisés comme vous le souhaitiez, il vous suffit de signer le procès-verbal sans réserve, et de payer le solde de la facture.

EN CAS DE MALFAÇONS

Vous constatez des malfaçons que vous mention- nez par écrit dans le procès-verbal. Dans le cadre de la garantie de parfait achèvement, l'entrepre- neur est tenu de réparer les désordres signalés. Tous les défauts doivent être réparés, quelle que soit leur importance. Vous n'avez pas à apporter la preuve d'une faute de l'entrepreneur, seulement à démontrer la réalité du dommage, sa responsa- bilité joue de plein droit.
Et c'est reparti. Vous devez maintenant fixer par écrit avec l'entrepreneur les délais d'intervention. Si le délai prévu n'est pas respecté, vous devrez le mettre en demeure (par lettre recommandée avec AR) de procéder aux travaux. S'il refuse, il vous faudra saisir le tribunal d'instance (ou de grande instance, si une somme supérieure à 7 600 € est en jeu) pour obtenir l'achèvement des travaux sous astreinte. Certains contrats prévoient d'effectuer une retenue de garantie, c'est-à-dire ne pas payer le solde de la facture. Une telle clause incite en général le professionnel à procéder aux réparations dans les plus brefs délais.


LES TRAVAUX SONT INACHEVÉS !

Les réserves étant par trop importantes, vous pouvez considérer que les travaux ne sont pas achevés et, dans ce cas, c'est un refus de réception que vous opposerez à l'entrepreneur. Cette décision est grave et doit être motivée. L'entrepreneur peut s'engager à terminer les travaux dans un nouveau délai fixé à l'amiable. S'il refuse d'admettre le non-achèvement, vous devrez saisir le juge des référés, pour demander l'achèvement des travaux sous astreinte après arbitrage.


LES TRAVAUX ONT PRIS DU RETARD

Le devis (obligatoire à partir de 150 €), ou un contrat d'entreprise, prévoit en général une date limite de fi n des travaux (elle est même obligatoire à partir de 500 €), et l'application automatique de pénalités en cas de retard. Pour les gros chantiers, comme ceux portant sur la construction d'une maison, c'est presque toujours le cas.
Pourtant, rares sont les artisans qui acceptent de faire fi gurer sur leurs devis des pénalités de retard. Mais ce n'est pas parce qu'elles n'y sont pas qu'il échappera au versement de dommages et intérêts, si ce retard vous a causé un préjudice. L'entrepreneur peut toutefois se dégager de sa responsabilité si vous êtes à l'origine du retard (dans le cas, par exemple, où vous avez demandé des travaux supplémentaires), en cas de force majeure (une grève qui rend impossible la livraison de certains matériaux), ou lorsque le chantier est arrêté à la suite d'intempéries rendant le travail impossible ou dangereux (chutes de neige alors qu'il doit refaire la toiture, par exemple).
Dans tous les cas, si vous ne trouvez pas de terrain d'entente, privilégiez les correspondances par lettres recommandées. Si l'affaire s'envenime, elles seront autant de preuves de vos démarches aux yeux des magistrats, et le versement de dommages et intérêts n'en sera que plus rapide. En l'absence de réponse, vous pouvez en effet saisir en référé le tribunal compétent, pour demander au juge d'ordonner la fi nition des travaux sous astreinte, ou lui demander l'autorisation de faire exécuter les travaux par une autre entreprise aux frais de l'entrepreneur défaillant.

NOTRE CONSEIL

LE PROCÈS-VERBAL DE RÉCEPTION

Insistez pour que la réception des travaux ait bien lieu, et ce, même si l'ouvrage vous paraît correctement exécuté. En effet, les délais des différentes garanties courent à compter de la réception. Lorsque vous voudrez les mettre en œuvre et si des défauts apparaissent par la suite, il sera difficile d'apporter la preuve de la date de la réception si cette dernière a été faite de manière tacite. Dans tous les cas, si vous avez à déclarer un sinistre entrant dans le cadre de la garantie décennale à votre assureur dommages-ouvrage, il réclamera, avant d'intervenir, le procès-verbal de réception.

Ces garanties qui vous protègent

Personne n'est à l'abri d'éventuelles malfaçons, et c'est tout l'intérêt de l'existence des différentes garanties. Elles courent respectivement sur un, deux et dix ans. L'entreprise vous doit une garantie de "parfait achèvement" pendant un an, de "bon fonctionnement" pendant deux ans, et elle doit réparer les défauts menaçant la solidité de la construction pendant dix ans.


PREMIÈRE ANNÉE, LA GARANTIE DE PARFAIT ACHÈVEMENT

Selon cette garantie, l'entrepreneur est tenu de réparer non seulement tous les défauts mentionnés le jour de la réception des travaux – même s'ils sont de faible importance, car vous avez le droit, comme le nom de l'assurance l'indique, à des travaux parfaitement achevés – mais également tous ceux qui seront signalés par écrit pendant un an à compter de cette date. Sauf, bien sûr, s'ils résultent de l'usure normale. En ce qui concerne les défauts constatés au cours de la première année, vous devrez prévenir l'entrepreneur par lettre recommandée avec accusé de réception, puis fixer avec lui le délai nécessaire aux travaux.


PENDANT DEUX ANS, LA GARANTIE DE BON FONCTIONNEMENT

Cette garantie couvre les défauts affectant le bon fonctionnement des équipements du logement comme une chaudière, un revêtement de sol ou de mur, une plaque électrique de cuisson, des menuiseries type fenêtres. Si, par exemple, vous avez fait monter des WC, et que l'adduction d'eau présente des signes de faiblesse, vous pouvez faire jouer la garantie biennale. Quand un problème de ce genre apparaît dans un délai de deux ans, vous devez le signaler à l'entrepreneur (toujours par lettre avec AR) et, s'il refuse de remplacer ou de réparer l'élément défectueux, ou encore de vous indemniser, il faudra vous tourner vers la justice pour faire valoir vos droits.
Cette garantie biennale, comme celle de "parfait achèvement", joue sans avoir à prouver une faute du professionnel. Ce dernier ne peut dégager sa responsabilité qu'en évoquant une "cause étrangère", c'est-à-dire la force majeure, la faute d'un tiers, ou encore votre propre faute ce qui, en pratique, lui sera très difficile.


LA DÉCENNALE, POUR LES TRAVAUX DE CONSTRUCTION

L'ensemble des personnes considérées comme des constructeurs (entrepreneur, architecte...) est réputé responsable des dommages qui affec- tent la construction pendant dix ans à compter de la réception des travaux (art. 1792 du code civil). La loi les oblige d'ailleurs à souscrire, avant l'ouverture d'un chantier, un contrat d'assurance les couvrant pour leur responsabilité décennale (dix ans).
La garantie décennale ne s'applique qu'aux travaux de bâtiments, et ne couvre que les dommages compromettant leur solidité, les rendant inhabitables (infiltration d'eau, par exemple), ou affectant la solidité des éléments dits indissociables. Or, tous les travaux ne sont pas considérés comme des ouvrages des bâtiments. Seuls sont concernés les travaux de réhabilitation, de trans- formation du bâtiment, de modification de volume (création d'un niveau supplémentaire, par exemple), et la réfection de l'étanchéité (toiture).
Les travaux d'aménagement entrent dans le champ d'application de la garantie décennale s'ils sont indissociables du bâtiment: installation d'une cuisine intégrée, par exemple. Par ailleurs, seuls les dommages présentant une certaine gravité sont couverts par la garantie. Les désordres à caractère esthétique en sont exclus, de même que les travaux d'entretien et de remise en état.


RESPONSABILITÉ CONTRACTUELLE DE L'ENTREPRENEUR

Certains travaux n'entrent pas dans le cadre des garanties biennale et décennale. C'est le cas, notamment, des travaux d'embellissement, d'où l'importance de contrôler soigneusement la bonne qualité de l'exécution et le respect de votre commande. Si vous constatez un défaut (carrelage qui se décolle, revêtement de façade mal appliqué, sans créer pour autant d'infiltrations...), vous devrez faire jouer la garantie contractuelle de l'entrepreneur, laquelle peut être mise en cause pendant trente ans, à partir du jour où vous avez constaté le dommage. Signalez le défaut à l'entre- preneur par lettre recommandée avec accusé de réception, en fixant un délai d'intervention. Si la réparation n'est pas effectuée, vous devrez saisir le tribunal, afin que soit reconnu votre droit.

Faire ainsi reconnaître la responsabilité contractuelle de l'entrepreneur sera plus difficile que d'engager sa responsabilité décennale, car c'est à vous d'apporter la preuve que l'entrepreneur a commis une faute. Dans bien des cas, vous devrez faire appel à un expert du bâtiment pour apporter cette preuve.


À VOTRE CHARGE, L'ASSURANCE DOMMAGES-OUVRAGE

Cette assurance doit être souscrite par le maître d'ouvrage, c'est-à-dire vous. Elle permet la réparation rapide des malfaçons les plus graves, celles qui relèvent de la garantie décennale. En apparence, elle fait double emploi avec l'assurance professionnelle des intervenants, mais son intérêt est de permettre la prise en charge des travaux, sans attendre qu'un tribunal se soit prononcé sur la responsabilité du professionnel. Seule ombre au tableau: cette assurance est chère, et semble de plus en plus difficile à obtenir par les particuliers. L'augmentation constante des déclarations de sinistres fait que beaucoup d'assureurs refusent de garantir les chantiers commandés ou réalisés par des particuliers. Toutefois, si vous avez confié vos travaux à un architecte, celui-ci pourra vous adresser à la Mutuelle des Architectes de France. De même, si votre maître d'œuvre est estampillé Synaamob, il fera en sorte que vous trouviez une assurance. Enfin, sachez que le Crédit Immobilier de France propose une assurance dommages-ouvrage à ses emprunteurs. En dernier recours, fort d'une lettre de refus d'une compagnie d'assurances, contactez le Bureau Central de Tarification (BCT) qui désignera, lui, un assureur. Il est donc tentant de faire l'impasse sur cette assurance mais, en cas de sinistre, elle évitera de longues procédures: l'assureur avancera le mon- tant des travaux de réparation, puis se retournera contre le (ou les) professionnel(s).


À VOTRE CHARGE, L'ASSURANCE DOMMAGES-OUVRAGE

Concrètement, si vous constatez des désordres de construction pouvant relever de la garantie décennale (après l'expiration de la garantie de parfait achèvement et jusqu'à la dixième année suivant la réception des travaux), vous devez faire, en recommandé avec accusé de réception, une déclaration de sinistre à la société d'assurances auprès de laquelle vous avez souscrit un contrat. L'assureur dispose d'un délai de soixante jours pour vous donner un avis, favorable ou non, mais toujours avec la communication d'un rapport d'expert (dont le rôle est de vérifier que le dommage subi relève bien de la garantie décennale). L'indemnité doit vous être versée dans les 90 jours suivant votre déclaration.


Bon à savoir !

La remise des clefs ne se négocie pas !

"Si vous émettez des réserves et consignez 5 % du prix, il n'y aura pas de remise des clefs." On trouve parfois des clauses dans ce sens dans les Contrats de Construction de Maison Individuelle (CCMI).

Bien qu'interdit par le code de la construction et de l'habitation, ce comportement existe. Si vous craignez ce type de réaction de la part du constructeur, faites-vous assister d'un professionnel lors de la réception des travaux. Sa présence sera d'autant plus utile qu'il pourra insister auprès du constructeur en lui rappelant ses obligations légales. Mais, dans certaines situations conflictuelles, la présence d'un huissier est indispensable pour constater le refus de remise des clefs. Il vous faudra alors saisir, toujours par l'intermédiaire de l'huissier, le président du tribunal de grande instance, pour obtenir une ordonnance de référé.


NOTRE CONSEIL

Garantie décennale ou non ?

Il est parfois difficile de savoir si des travaux réalisés relèvent ou non de la garantie décennale, et par conséquent de l'assurance dommages-ouvrage. En cas de doute, vous pouvez présenter le devis détaillé (nature des techniques et des matériaux mis en œuvre) à votre assureur, pour avoir plus de précisions.


LA LOI

Assurance obligatoire pour les professionnels

La loi oblige tous les professionnels participant à la construction à souscrire, avant l'ouverture du chantier, un contrat d'assurance les couvrant pour leur responsabilité décennale. Exigez de chacun des intervenants une attestation d'assurance, vous en aurez besoin par ailleurs pour constituer votre dossier d'assurance dommages-ouvrage. L'architecte doit également être assuré pour sa responsabilité professionnelle.


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